mardi 4 décembre 2018

LES PETITS PAS ?



Cinq ans déjà.

Cela fait cinq ans qu'était régulièrement dénoncée en ces murs l'invitation faite aux femmes sans antécédent à réaliser une mammographie de dépistage dès l'âge de quarante ans en dehors de toute recommandation scientifique.

Oui, dilatez- vous les pupilles, remontez vos lunettes sur vos tarins, vous avez bel et bien lu : « EN DEHORS DE TOUTE RECOMMANDATION SCIENTIFIQUE ».
Nom d'un chien !

Pour certains, la première salve d'alerte comparait maladroitement le mammobile à la papamobile. Pourtant, la métaphore était calculée au millimètre puisque nous sentions bien là toutes les effluves d'une médecine de paroisse, une spécificité locale, une expérimentation vouée à prendre son temps. Le temps étant de l'argent, gagner du temps, c'est gagner de l'argent, tout simplement.

L' Agence Régionale de Santé fut informée, l'Institut National du Cancer (bien connu de l'actuelle ministre de la santé) fut alerté.

Puis...

Rien. Nada. Que tchi.

Depuis, des mammobiles sont passés sous les ponts.

Des nanas ont laissé leurs seins sous les rayons.

Des piqûres de rappel ont été projetées dans la toile sous une forme et sous une autre.

Silence. Silence silencieux. Très silencieux.

Notre société est ainsi. Il est tellement plus important de savoir que telle star du web s'est fait bouillir des nouilles, que telle autre starlette à la nouille a mis ses chaussettes à l'envers, photos à l'appui partagées instantanément sur tous les réseaux sociaux possibles.

Je me suis souvent posé la question du rôle de l'Ordre des médecins sur ce sujet.
L'Ordre est avant tout là pour le respect de la déontologie, pas pour des questions scientifiques. On l'a cependant entendu applaudir de ses plus fermes paluches l'extension de l'obligation vaccinale. On l'a aussi vu s'émouvoir sur les Brutes en blanc de Martin Winckler dénonçant certaines pratiques médicales.

Mais.

Mais pas le moindre mouvement de sourcil quant à cette pratique du dépistage organisé du cancer du sein dès quarante ans alors qu'il s'agit d'un âge où les risques de sur-diagnostic et de sur-traitement sont plus importants que les bénéfices.

Ne peut-on pas considérer là qu'il est question d'information déloyale et trompeuse sur cette tranche de la population, donc de déontologie ?

Ce qui est certain, c'est qu'enfin, après cinq ans, malgré la timidité de l'Agence Régionale de Santé et de l'Institut National du Cancer, malgré le silence de l'Ordre médical, alors que pas plus tard qu'en fin d'année dernière encore les femmes de quarante ans recevaient à leur domicile l'invitation à ce dépistage, désormais, le message est rétabli. Le mammobile se déplace toujours de villes en villes avec le chiffre cinq masquant le chiffre quatre. Enfin, la brebis égarée est rentrée dans le rang de la bergerie.


On ne connaîtra pas l'origine de ce basculement. Mais quelques noms me viennent en tête car je pense qu'ils ont largement contribué à ce petit pas.

Je pense à :





Aux membres de Cancer rose avec une mention spéciale à la fougueuse radiologue 

Aux sites journalistiques Dis-leur et APM News.

Mais j'en oublie d'autres.

Cinq ans. Cinq ans déjà. Mais cinq ans c'est tellement long pour ce petit pas.

Un petit pas pour le dépistologue, un grand pas pour ?

La vie n'est pas toujours rose, donc quand certains veulent la rendre rose au mois d'octobre, petit conseil : faites un petit pas de côté. Le débat de ce dépistage dès quarante ans semble clos, reste désormais à réaliser quelques pas sur celui à partir de cinquante ans ?