Depuis
quatre ans, le dépistage systématique du cancer du sein des femmes
sans facteur de risque proposé dès l’âge de quarante ans par une
structure mobile dans l’Hérault est régulièrement questionné
sur ce blog. Quelques éléments de réponse éclairants pour ne pas
dire tourneboulants ont été récemment apportés.
Précisons
que les recommandations de la Haute Autorité de Santé (HAS) comme
les préconisations de l’Institut National du Cancer (INCa)
invitent au dépistage par mammographie tous les deux ans les femmes
sans facteur de risque âgées de cinquante
à soixante-quatorze ans
en les informant le plus clairement possible sur les tenants et
aboutissants de cet examen.
Ce
dépistage dès quarante ans ?
Il
est logique de penser que plus on dépiste tôt, mieux c’est.
Malheureusement, tel n’est pas le cas pour le cancer du sein avec
cet examen dès cet âge du fait notamment des risques de
surdiagnostics
ou encore d’irradiations
répétées.
Pour
faire simple, la balance bénéfices / risques de cet examen en
systématique chez les femmes entre quarante et cinquante ans est
défavorable.
Outre
l’âge en dehors des recommandations, le poids de la
communication ?
La
structure mobile questionnée dans l’Hérault est un camion qui
sillonne les communes du département afin de faire bénéficier du
dépistage pris en charge par l’assurance maladie les femmes de la
tranche d’âge recommandée.
Pour
les femmes plus jeunes, ce sont les communes hôtes qui financent
l’examen. Et la communication autour de ce programme a de quoi
interpeller à l’heure où les citoyennes sont en droit de recevoir
une information la plus transparente possible.
Tout
d’abord, on parle d’un mammobile
et de mammotest
ce qui peut tromper l’œil non averti. Ni le courrier d’invitation,
ni le site internet de l’association, ni le mammobile ne
mentionnent clairement le terme « mammographie ».
Ensuite,
on présente un examen « 100
% utile dès 40 ans »,
avec l’affirmation suivante « On
a toutes à y gagner ».
Ces formulations sont trompeuses.
Interpellé
il y a quatre ans, l’INca alors dirigé par notre actuelle ministre
de la santé avait sourcillé, reconnaissant je cite « que
le
programme national de dépistage organisé du cancer du sein porte
sur la tranche d’âge 50-74 ans…
…Pour
la tranche d’âge 40-49 ans, les bénéfices attendus sont
effectivement moindres alors que les risques sont plus élevés
(cancers radio-induits, surdiagnostic)…
…Nous
considérons qu’il n’y a pas lieu, en l’état des évaluations
et recommandations nationales actuelles, de proposer ni de soutenir
un dépistage par mammographie à des personnes de 40-49 ans sans
facteur de risque particulier, que ce soit ou non en mammobile…
…Il
revient à l’Agence régionale de santé (ARS) du
Languedoc-Roussillon de se prononcer sur le sujet… »
Cette
seule réponse de l’INCa vieille de quatre ans confirme que « 100
% utile dès 40 ans » pour des femmes qui « ont toutes à
y gagner » sont des arguments qui en langage diplomatique vont
à l’encontre des données scientifiques. En mode sans langue de
bois, on parlerait plutôt d’affirmations mensongères.
Récemment,
le sujet s’est retrouvé dans le viseur du site Dis-leur sous le titre :
Cancer du sein : « Dépister en
masse avant 50 ans, une hérésie ! »
L’article
(malheureusement non en accès libre) donne la parole au Dr Cécile
Bour, radiologue membre du collectif Cancer Rose qui pose bien la problématique exprimée dans le titre. De leur
côté, les journalistes ont investigué et ce qu’ils ont relevé
vaut son pesant de cacahuètes.
Tout
d’abord, ce qui faisait sourciller l’INCa il y a quatre ans
semble le faire sursauter aujourd’hui. Extrait : «Nous
avons sursauté en constatant ces messages sur le Mammobile
héraultais et sur l’invitation. On se bat justement pour qu’une
information claire soit délivrée. »
Dont acte. Avec une ancienne présidente désormais aux manettes du
ministère de la santé qui n’a pas hésité à trancher au sujet
de l’obligation vaccinale, les conditions sont réunies pour que le
sursaut se propage jusqu’aux tabourets de l’Agence Régionale de
Santé.
Ensuite
parole est donnée aux défenseurs du dépistage par mammotest dès l’âge de
quarante ans.
On
y parle gratuité,
complémentarité avec la radiologie privée, difficultés d’accès
au dépistage dans certains quartiers, certaines communes. Si ces arguments de justification peuvent s’entendre, d’autres
semblent plus discutables comme le fait que ce dépistage soit
historique
dans le département. J’ai un grand respect pour l’histoire, mais
historiquement, on pratiquait la saignée, la purgation, etc... Puis
ces pratiques furent abandonnées avant de devenir historiques
justement. C’est intéressant d’observer comme d’une façon
générale en médecine il est difficile de tirer un trait sur des
pratiques pourtant néfastes pour les patients.
Enfin,
à mon sens, la défense s’effondre littéralement lorsqu’elle
invoque la RENTABILITÉ. Car voyez-vous, la rentabilité du mammobile
n’est atteinte qu’à partir de trente personnes dépistées par
jour. La seule façon d’obtenir ce quota est d’ouvrir la porte du
camion rose aux femmes dès l’âge de quarante ans.
Si
l’on suit cette logique, et avec un peu d’humour grinçant, on
pourrait donc imaginer atteindre une bien meilleure rentabilité en
ouvrant la porte du camion rose aux femmes dès trente ans, dès
vingt ans… voire aux hommes… Rentabilité quand tu nous tiens. Où
l’on voit que plus on pense rentabilité, moins on réfléchit
scientifiquement, au point de se prendre les pieds dans le tapis.
Bonjour
RépondreSupprimerSi je résume ce que ton article nous apprend :
La mammographie avant 40 ans est dangereuse raison pour laquelle les recommandations sont de la réaliser en dépistage à partir de 50 ans.
Dans l’Hérault les responsables de la mammamobile font la promotion de la mammographie de dépistage dès 40 ans en opposition avec toutes les recommandations.
Ils le font pour des raison purement mercantiles et donc la santé des femmes est le "cadet de leurs soucis".
L'INCA le sait depuis plusieurs années mais ne fait rien.
L'ARS de l'Hérault le sait depuis plusieurs années mais ne fait rien.
Le conseil de l'Ordre des Médecins dont le président dit vouloir lutter contre la "désinformation" en médecine, ne fait lui non plus rien du tout.
Donc toutes les autorités qui ont le pouvoir de faire cesser un tel scandale, ne font rien.
Il semble en effet que l'on puisse résumer l'affaire ainsi avec quelques corrections : la mammographie avant 50 ans et non 40 ans, et l'ARS anciennement du Languedoc-Roussillon, maintenant de l'Occitanie.
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