Le
21 août 2014, après une dizaine d’années de revendications
syndicales, alors que tout le monde s’en tamponne goulûment le
coquillard, les décrets « revalorisant » le statut des
médecins territoriaux sont parus au Journal Officiel. Victoire !?!?
Signés
s’il vous plaît de la main du premier ministre MANUEL VALLS, de
la ministre
de la décentralisation et de la fonction publique MARYLISE
LEBRANCHU, du
ministre des finances et des comptes publics MICHEL
SAPIN, de la
ministre des affaires sociales et de la santé MARISOL
TOURAINE, du
ministre de l’intérieur BERNARD
CAZENEUVE, du
secrétaire d’État chargé du budget CHRISTIAN
ECKERT
(heureusement qu’y
en n’a pas un de plus car j’ai plus de souffle, inspiration
profonde….. voilà, ça va mieux, et tu remarqueras au passage que le remaniement ministériel du 26/08 les a tous épargnés les veinards).
Comme
on pourrait s’y attendre, il s’agit de revaloriser la grille
indiciaire (le salaire) peu attractive des médecins exerçant au
sein de la fonction publique territoriale, et de l’approcher voire
de l’aligner avec les grilles d’autres fonctions publiques.
Les
négociations ne datent pas d’aujourd’hui et une avancée
importante semblait poindre en fin d’année 2013 puisque le cabinet
de la ministre de la fonction publique annonçait
qu’un décret revalorisant la grille des médecins territoriaux
serait présenté au Conseil supérieur de la Fonction publique
territoriale (CSFPT) en janvier 2014, en vue d’une publication au
premier trimestre.
La
publication au premier trimestre a donc eu lieu le 21 août… Boh,
c’est pas bien grave hein, on n’est plus à quelques mois près !
Et pis y a fallu aussi collecter les gribouillis de toute cette
tripotée de ministres. Tu vois bien, c’est pas si fastoche que
ça !
Et
pis pour le même prix, on n’a pas un mais DEUX décrets !!!
Donc ça prend deux fois plus de temps sûrement.
Le
projet de décret présenté en février 2014 était encourageant
puisqu’il laissait entrevoir une honorable revalorisation notamment
pour les médecins en bas de l’échelle autrement appelés
« médecins de 2 ème
classe ». Au passage, il faut probablement avoir l’esprit
sacrément tordu pour pondre ce type de grilles. Comme quoi l’ENA &
Co. forme (ate) des tronches encore plus zarbi que la fac de
médecine…
Au
final, il y a bel et bien une revalorisation mais mais mais mais
mais….. accompagnée d’un reclassement. Cela veut tout bonnement
dire qu’un médecin ayant atteint un certain échelon se verra
reclassé dans un nouvel échelon impliquant au mieux une petite
revalorisation du type trois mars et un carambar, au pire rien du tout. Et
pour couronner le tout, il pourra prétendre avancer dans les
échelons moins vite qu’auparavant. Alors, tu la sens la belle
entourloupe ?
Comme
tu la sens pas trop et que j'ai du mal à résister à l'envie de
détailler le sujet, voici du concret.
Si
tu es normalement constitué, tu dois grosso modo paner que dalle à
ce tableau, ce qui est plus que probablement fait exprès.
Voici
une traduction : après 9 ans d'études et la spécialité de
médecine générale en poche, tu peux tenter d'aller bosser dans la
fonction publique territoriale, et ainsi être possiblement recruté
comme médecin 2ème classe 1er échelon avec un indice brut de 528.
Tu suis ? Non ? C'est normal. A cet indice brut correspond
un indice majoré de 452 qui n’apparaît pas sur le tableau.
Pourtant l'indice majoré, c’est important puisque c'est tes sous !
Le point d'indice, c'est à ce jour environ 4,63 Euros. Soit 4,63
multiplié par 452 = 2000 et quelques Euros bruts, auxquels tu peux
ajouter une ou deux indemnités variables selon la collectivité qui
t'emploie, donc en gros les 2000 euros + indemnités – cotisations
= tu retombes sur tes pattes ce qui veut dire environ à vue de nez
que ça te fait ton salaire mensuel net avant impôts. Bac + 9 =
possiblement 2000 et quelques Euros par mois en début de carrière
soit 24000 Euros/an avant impôts (je ne ferai aucun commentaire et
laisserai le lecteur juger de lui-même si ça vaut le coup de faire
9 ans d'études tout en continuant à éructer que tous les médecins
sont des nantis sans faire la distinction avec d'éventuels
chirurgiens esthétiques implanteurs de cheveux qui les yeux dans les
yeux les couilles dans le slip ont réussi à se hisser jusqu'au
ministère du budget ni vu ni connu et vas-y que j'... bip). Revenons
à notre jeune médecin territorial qui devra ensuite engranger entre
13 et 15 années et demi d'ancienneté pour atteindre l'indice majoré
de 783 qui équivaut à l'heure actuelle si tu suis toujours à 3 600
Euros.
Très
sincèrement, tout cela n’est qu’un micro-détail au milieu de la
crise que traverse notre pays, de la misère et des graves conflits
qui s'abattent sur notre si belle planète, nous sommes bien
d’accord.
Ce
petit détail est même plutôt rassurant puisqu’il montre le
fabuleux don d’ubiquité du foutage de gueule. Que l’on soit
médecin ou pas, soignant ou pas, fonctionnaire ou pas, salarié, libéral, pharmacien en colère, chômeur,
étranger, RSAiste, CMUiste, jeune, vieux, etc, pas de jaloux, chacun dans son domaine a droit à son
foutage de gueule venu tout droit de nos élites. S'il est un
principe de notre belle devise nationale respecté à la lettre,
c'est bien le principe d'égalité... face au foutage de gueule !
Mais
au-delà de ce cas précis, ce détail sans grande conséquence sur
le fond, ne peut-on pas s’inquiéter de la méthode employée par
ces élites ? Faire miroiter des choses inatteignables, rouler
dans la farine, entuber à tout-va, transpirer la mauvaise foi, les
entourloupettes de dernière minute, tout cela n’est-il pas
dangereux ? Pourquoi esquiver de réelles discussions entre
adultes consentants ? Pourquoi ne pas dire : « écoutez
les gars, les temps sont durs, ça on peut pas, on préfère être
honnêtes » pour mieux faire passer la pilule ? Mais
non, les élites continuent à nous entourlouper comme des veaux.
Heureusement ou pas, la majorité du peuple est sage.
Certains
s’arment de ce genre de produit de sorte que ça fasse moins mal la
prochaine fois en sachant qu’il paraît que c’est encore mieux en
la mélangeant avec de la Xylocaïne :
D’autres
rêvent secrètement à ça sans pour autant oser bouger le petit
doigt :
J'avoue
personnellement osciller très maladroitement entre les deux options.
Mais
au final, face à l'épidémie galopante du désenchantement, j’ai bien peur qu’à force de se décrédibiliser en
permanence, le pouvoir politique comme certaines faiblesses
forces syndicales ne radicalisent les esprits d'un trop grand nombre au point
d’ouvrir un boulevard à d'autres bien plus malveillants encore... J'espère me tromper lourdement.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire