Pour
introduire ce billet, voici comment peuvent être présentés voire
se présenter certains médecins d’aujourd’hui : France 3 Limousin
Ce
reportage réalisé par des journalistes (donc des pros) dont le
boulot consiste à informer la population pourrait parfaitement
illustrer un de mes précédents billets traitant des déserts
médicaux : Désert... vous avez dit désert ?
Mais
je préfère t’inviter à aller lire les billets plus récents
d’autres médecins. Ils sont en lien * à la fin de cet écrit.
Leurs diverses réactions me semblent intéressantes et complètes.
J’approuve totalement et j’aimerais donc aborder ici ce genre de
traitement médiatique pour enchaîner sur les médecins de demain
plutôt que ceux d’hier…
Parce qu’on peut remonter loin pendant
qu’on y est, style ça :
ou
mieux, encore plus loin, pourquoi pas ça ?
On
peut tirer à boulets rouges sur les propos du médecin de ce
reportage qui n’apportent rien de constructif, et ne font que
diviser les générations. Mais pour prendre un peu sa défense,
gardons à l’esprit qu’il faut toujours se méfier des propos
tirés de leur contexte (coupures, réponses sans entendre les
questions etc…). Les journalistes sont des pros de l’interview et
savent parfaitement faire dire ce qu’ils souhaitent faire entendre.
Ce médecin était peut-être interviewé pour la première fois de
sa longue vie de médecin dévoué corps et âme à ses patients, et
faire face aux caméras, ce n’est pas toujours évident. Concernant
le sujet de la désertification médicale, je me répète, mais une
fois que tu as vu un reportage, ou lu un article de presse, tu les as
tous vus et lus, on commence à connaître la chanson. Les
journalistes ne se renouvellent pas beaucoup. Donc ce qui me vient
aussitôt à l’esprit, c’est cet immense pouvoir d’influence
qu’ont les médias sur la population. Bon OK, ça non plus ce n’est
pas un scoop et j’aurais même parlé de pouvoir de manipulation
mais restons naïfs et modérés, ça le fait mieux. Bref, avec ce
type de reportage, les journalistes (plus que le médecin finalement)
auront réussi en quelques secondes à diviser jeunes et vieux
médecins généralistes, monter la population contre les jeunes qui
ne sont que des fainéants, faire fuir les très rares courageux (encore une espèce en voie de disparition apparemment...), et angoisser les gens de ces soi-disant déserts quant à leur accès
futur aux soins (de 1er
recours, parce que pour le reste, tout va bien Madame la Marquise !).
Voilà une réalité servie et resservie à en faire une indigestion,
même à en vomir.
Les
journalistes, bon on va plutôt écrire « ces »
journalistes pour ne pas tous les mettre dans le même panier, ne
prenons pas leurs défauts, nous présentent approximativement ce
qu’étaient les médecins d’hier, ce qu’ils seraient
aujourd’hui, et vont même jusqu’à s’avancer sur ce qu’ils
seront demain.
Médecins
de demain ?
Tiens, tiens, en voilà une
bonne idée, parler des médecins de demain. Bingo, c’est déjà
fait, affaire pliée, France 4 (encore France Télévision, comme
quoi y a pas que sur TF1 qu’on raconte des conneries, public comme
privé, même combat), émission en plusieurs épisodes présentant
le parcours d’internes en médecine qui deviennent de jeunes
médecins et seront les médecins de demain. Nos médecins de demain.
Waouh, génial, c’est top ça !
Ce
type d'émission présente il me semble un seul avantage, celui de
possiblement faire naître quelques vocations. Bon, très bien. Sauf
que ben, des vocations, on n’en manque pas si tu vois le nombre
d’inscrits en première année à la faculté de médecine, ça
c’est bon, ça attire toujours. Après, évidemment, il y a le
numerus clausus à régler, mais si on veut, si on règle bien les
vannes, pas de souci pour les vocations et les effectifs des médecins
de demain. Il suffit de vouloir et d’anticiper un peu quoi…
D’après
cette émission, donc d’après une poignée de journalistes voulant
éclairer la population, le médecin de demain, c’est un futur
chirurgien, une future gynéco, une future réanimatrice,
tralalitralalerre. Ils sont cool, motivés, souriants, tout va bien. Ils sont top classes ces médecins de demain. On les voit évoluer
durant leurs stages hospitaliers, au milieu des malades super malades
et de leurs séniors toujours très présents, plutôt sympathoches,
hyper pédagogues, tralalitralalerre. C’est là qu’on peut se
poser des petites questions : nos amis journalistes nous
présentent leur réalité, mais est-ce la seule ? N’y a-t-il
pas un petit risque de désillusion en présentant les choses
idéalisées ainsi ?
Je
ne veux surtout pas nier la réalité de cet aspect des études
médicales, cette façon de voir et de montrer la formation ainsi que
l’exercice de jeunes médecins. Mais ces études, c’est aussi des
seniors pas toujours très présents, pas toujours très sympas, ni
très pédagogues. C’est aussi le mépris, l’arrogance,
l’humiliation de certains mais toujours trop nombreux chefs de
service ou simples médecins sur leurs internes, certains internes
sur les externes etc… des comportements qui se répètent
génération après génération, des comportements
transgénérationnels (je crois que c’est comme ça qu’on dit
pour faire bien). Je sais que c’est pas trop marrant de parler de
ça, ça réveille chez certains de mauvais souvenirs, de méga
grands docteurs qui sont les meilleurs et à qui t’as plutôt
intérêt à lécher les bottes se sentent un peu visés, quelques
peu froissés. Mais si le boulot des journalistes, c’est de relayer
la réalité des choses, ben voilà quoi.
Alors
si tu as regardé cette fameuse émission, tu vas me dire que moi non
plus je ne relaie pas correctement. Ouais, sauf que moi je ne suis
pas journaliste, alors je fais ce que je veux na ! Ben ouais,
OK, j’ai omis de parler de cet interne de médecine générale
parfois rigolo, plutôt beau gosse, et qui devient……roulement
de tambour…..jeune médecin urgentiste. Bingo. Y en avait un autre
au début d’interne de médecine générale, mais lui il a disparu,
parce qu’il est peut-être vraiment allé faire de la médecine
générale, voire se perdre dans un désert va savoir ? Donc
lui, out ! Aucun intérêt d’en parler j’imagine, pas très
« reportagénique » sans doute (ne cherche pas, ce mot
n’existe pas, on dit télégénique normalement, pourtant j’suis
sûr que t’as compris ce que ça veut dire).
Donc
voilà une émission que beaucoup trouveront pas mal faite, qui nous
parle des médecins de demain, en ne parlant que de médecine à
l’hôpital et pas du tout de médecine générale. On parle de
technicité, de gestes vitaux, avec les commentaires typiques en voix-off et la
petite musique angoissante, attention, suspense : « Machin
se prépare pour une intervention délicate… », « Le
jeune Dr Trucmuche a tout de suite remarqué l’état de son patient
qui peut se dégrader à tout instant, il lui administre aussitôt le
médoc adéquat, miracle, son patient est sauvé… » et
tralali et tralalerre, c’est super.
Le
souci, c’est que franchement, justement, il n’y a aucun souci à
se faire pour toutes ces disciplines techniques. Nos facultés de
médecine forment et continueront à former de très bons techniciens
de la médecine et cela est nécessaire. Sauf, que parler des
médecins de demain comme d’aujourd’hui, ce n’est pas seulement
ça. Parler de médecins de demain en ne parlant que de l’hôpital,
jamais de médecine générale, c’est un peu gênant. Et quand on
parle des médecins généralistes de demain, n’aborder que ces
fainéants qui ne vont pas dans le désert parce qu’ils ne pensent
qu’au fric de leurs « clients », ça tortille un peu
les boyaux.
Il
me semble que parler des médecins de demain, ce n’est pas que mais
c’est aussi parler de la médecine :
-sans
geste technique hyper méga pointu
-sans
prescription médicale
-sans
service hospitalier
-sans
cow-boy filant à toute allure sur un arrêt cardiaque ou un accident
de la route
-bref
c’est aussi parler d’une médecine sans grand spectacle, en
apparence.
Tu
vas me dire qu’il ne reste plus rien à dire alors, que ce n’est
pas de la médecine, ou alors de la médecine d’avant avant
avant-hier. C’est de la Préhistoire, de la médecine sans
médecin !!!
Pourtant,
la médecine de demain, c’est peut-être justement aussi la
médecine qui prend du recul par rapport à cette surabondance de
technicité, d’examens en tout genre, de molécules par milliers,
pour ne pas tout mettre à la poubelle, bien évidemment que non, et
surtout pas, mais pour les utiliser à bon escient, et aussi ne pas
avoir peur de ne pas les utiliser. Car à mal ou trop utiliser cet arsenal, parfois
pour se rassurer, le médecin peut devenir nocif pour le patient. En médecine comme dans tout autre domaine, ne nions pas le
progrès, mais utilisons-le à bon escient. Un peu de pub gratuite,
l’Éditorial de la Revue Prescrire de septembre 2013 s’intitule :
« Trop de médecine nuit »… Morceau choisi :
« Mais aujourd’hui, au moins dans les pays les plus riches,
davantage de soins n’est pas toujours synonyme de meilleure
santé. » Mais attention aux phrases tirées de leur contexte
hein ! Mieux vaut tout lire pour te faire ton opinion.
Concluons
par un peu d’optimisme, car cette médecine de demain que ces journalistes ne relaient pas, c’est déjà
de plus en plus celle d’aujourd’hui. Il suffit d’aller lire les
blogs de jeunes et moins jeunes médecins, généralistes comme
spécialistes, mais aussi ceux d’étudiants (Litthérapeute), et
d’internes (Le bruit des sabots). Cette réalité-là, cette remise
en question, cette force de proposition, elle existe bel et bien. Qui
peut parler de médecine mieux que les médecins et futurs
médecins ? Pour le moment, pas ces journalistes. Il faudrait d’abord
qu’ils apprennent à relayer de bonnes infos, à traiter les sujets
correctement, dans leur intégralité, sans caricature, sans angélisme, et surtout sans
manipulation.
*Comme
promis, les fameux liens vers :
-une
des stars des médecins blogueurs : Fluorette : Les premiers d'une nouvelle espèce
-une
jolie façon poétique de traiter le sujet chez DZB17 : La ficelle
-et
enfin une bloggeuse souvent touchante, toujours percutante :
Armance : De bien belles images
-tiens,
pour le même prix en voilà un quatrième gratis pour te montrer
qu’un médecin généraliste, ce n’est pas cet imbécile qui ne
s’occupe que des « nezquicoulent », lis ce billet
de Farfadoc , tu m’en diras des nouvelles.
Sur
tous ces blogs, tu trouveras d’autres liens, et encore d’autres
liens, toute une toile de liens pour découvrir une autre réalité
que celle qu’on nous ressert et ressert tralali tralalerre.
La preuve, encore un billet sur le sujet que j'avais oublié mais que je m'empresse d'ajouter chez Dr Kalee.
Bonjour!
RépondreSupprimerJe voudrais savoir le titre de la music du générique?
ça fait longtemps que je cherche!! mais je trouve pas
Cordialement!
Ce commentaire a été supprimé par un administrateur du blog.
RépondreSupprimerThis is greatt
RépondreSupprimer